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La reconnaissance des accomplissements des femmes dans la création musicale

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La reconnaissance des accomplissements des femmes dans la création musicale

La reconnaissance des accomplissements des femmes dans la création musicale.

Vous m’aviez oubliée ?

Bonne journée internationale des droits des femmes ! En ce jour spécial, Europavox souhaite rendre hommage à de grands noms qui ont marqué l’histoire de la musique : Schubert, Mendelssohn et Caccini. Pour être plus précis Clara Schubert, Fanny Mendelssohn et Francesca Caccini. Message aux autres Schubert, Mendelssohn et Caccini : aujourd’hui n’est pas votre journée.

Vous êtes surpris ? Rien d’étonnant. Les femmes compositrices ont été historiquement oubliées ou négligées par leurs homologues masculins, aidées en ceci par un refus systémique et historique d’accès à l’enseignement accompagné de cette idée, qui perdure encore aujourd’hui de façon exaspérante, qu’une femme n’atteindra jamais une excellence intellectuelle et artistique de la même ampleur que celle de n’importe quel homme.

Pensez à vos films préférés. Maintenant, pensez à ceux qui en ont composé la musique. Vous aurez probablement en tête des noms tels que John Williams, Hans Zimmer et Ennio Morricone. Que devient dans ce panthéon Rachel Portman, qui a écrit en 2010 la musique du drame déchirant Never Let Me Go ? Ou Lesley Barber, avec Manchester by the Sea en 2016 ? Ou encore Hildur Guðnadóttir, lauréate d’un Oscar, avec Joker en 2019 et également aux commandes pour la série Tchernobyl de HBO en 2019 ?

Toutes les femmes savent bien que ce manque de reconnaissance n’est pas nouveau. Björk le formule ainsi : « tout ce qu’un homme dit une fois, il nous faut le dire cinq fois ». Même ici, en Islande, régulièrement cité comme l’un des pays les plus avancés au monde en termes d’égalité de genres, les femmes gagnent en moyenne 12% de moins que les hommes. Les femmes ont constamment dû se battre pour leurs droits, de l’éducation au vote en passant par la reconnaissance de leur carrière. Mais l’accès à lui seul ne suffit pas, et on ne peut pas se contenter d’un monde qui se contente de beaux symboles, pas quand une étude de PRS indique que les dix femmes les mieux rémunérées parmi les auteurs et compositeurs de chansons sont 70% moins bien payées que le même top 10 côté hommes ; Soixante-dix pourcent !

Est-ce que cela veut dire que les songwriters femmes sont 70% plus mauvaises que les hommes ? Evidemment pas. Au final, Hildur est l’une des songwriters les plus acharnées à la tâche de l’industrie de la musique islandaise, deux chansons co-écrites par Bríet sont diffusées en boucle à la radio islandaise, et Laufey Lín fait parler d’elle des deux côtés de l’Atlantique, avec des louanges de Billie Eilish en personne.

Ce qui se passe au contraire, c’est qu’elles subissent les décisions d’une population historiquement, systémiquement et systématiquement composée en grande majorité d’hommes blancs qui sont – sans forcément en être conscients – moins enclins à prendre en considération les travaux soumis par des personnes qui ne leur ressemblent pas. Il n’est pas surprenant que le biais de confirmation, l’un des plus anciens modèles cognitifs de l’histoire, nous apprenne que les gens ont tendance à se souvenir plus favorablement du travail de ceux qui leur ressemblent. Pour être clair, personne ne choisit activement d’exclure les femmes, mais les femmes sont – littéralement – oubliées, car personne ne se souvient d’elles. Et ce schéma, qui se répète et se répercute dans le temps, nous a menées là où nous sommes aujourd’hui.

Nous devons également évoquer l’intersectionnalité, ce phénomène par lequel l’empilement des discriminations mène à des situations encore plus difficiles à l’encontre des femmes issues de milieux subissant eux aussi des dominations : femmes transgenres, femmes de couleur et femmes issues de milieux socio-économiques défavorisés. La lutte pour l’égalité des sexes ne peut être menée que si nous nous mobilisons toutes et tous ensemble. Nous n’aurons pas gagné tant que nous n’aurons pas tou.te.s gagné.

Si nous n’incluons pas consciemment, nous excluons inconsciemment. Un quota de représentation doit être imposé aux comités décisionnels : à tous ceux qui embauchent, désignent et mettent à l’honneur. Si 50 % du monde est composé de femmes, il va de soi que 50 % des décideuses devraient également être des femmes. Alors, et seulement alors, nous pourrons garantir que nul ne risquera d’oublier leur apport.